Osnova, Moscou & Rodríguez, Poznan - Dialogue
Michal Martychowiec et Andrei Pokrovskii
Les galeries Rodriguez et Osnova présentent une exposition en duo avec les artistes Andrei Pokrovskii et Michal Martychowiec.
L’installation de Michal Martychowiec Sous les pavés, la plage ! fait référence au slogan utilisé dans la France de 1968. Il exprimait le désir que sous la ville durcie par la pierre, il y ait la liberté de la plage (représentée par le sable dans lequel les pavés étaient placés).
L’œuvre engage un certain renversement : au niveau zéro, il y a le concret. Sous le trottoir, il devrait y avoir le sable de la plage, symbolisant la liberté et la nature. Le sable est ainsi pris par en dessous et placé sur le dessus, à la différence près qu’il est remplacé par du cristal – un matériau produit industriellement qui n’est plus représentatif de la nature -, commun et sans valeur comme le sable en fait, mais pour une étrange raison considéré comme précieux.
L’installation est construite à travers une étude complexe des cadres historiques : le titre poétique nous fournit en quelque sorte une image romancée de l’histoire. Mais le langage visuel l’est aussi : les murs bleus, la chaise longue et le parasol sont tous là pour apporter l’image d’une sorte de publicité de vacances vintage. Seuls les cristaux qui ont remplacé le sable nous rapprochent du contemporain, car dans le langage des médias contemporains rien ne doit être réel, c’est-à-dire imparfait, et peut-il y avoir un substitut moins imparfait au sable, si ce n’est le cristal qui, soit dit en passant, en est fait. Le travail analyse plusieurs récits que 1968 représente, mais surtout explore les deux aspects omniprésents de la civilisation humaine : la violence et la liberté.
Ici, l’aspect existentiel de la lutte pour la liberté des manifestant·es français·ses se juxtapose au cadre existentiel de la société contemporaine où le sens existentiel se vérifie non pas à travers une lutte dramatique pour la liberté, mais par la consommation.
Dans ses œuvres présentées à côté de celles de Michal Martychowiec, Andrei Pokrovskii a créé une série de systèmes spatiaux clos et isolés. Ce sont des vues panoramiques de cours, de ruelles et de passages, dont le prototype est l’album graphique du XVIIIe siècle Monasticon Universum qui contient des croquis topographiques d’abbayes françaises.
Un état de conscience particulier de l’espace et de l’environnement se développe dans de telles situations extrêmes, l’attention est portée sur les détails de l’intérieur et de l’extérieur – en tant qu’outils pour l’incarnation d’une certaine intention ou pour les seul·e·s « interlocuteur·ice·s » qui attendent dans un abri. Ces contacts intimes (attention ultime, conscience, tactilité) forment un lien intime entre le personnage et le lieu. La communication est réalisée par un contact intense mais de courte durée avec l’espace, car le personnage dans ces circonstances est toujours un étranger.
De la même manière, les cloîtres d’Andrei sont l’exemple d’un système parfaitement isolé qui est « sorti » du monde extérieur et des contextes familiers.
Comme dans l’ancien décor de jeu vidéo, nous ne savons rien de l’emplacement – l’espace ne possède qu’un soupçon de trame de fond, le vague présent et futur. Le niveau mondial monastique accueille si peu d’habitant·e·s personnages qu’un·e invité·e, de la même manière qu’un·e spectateur·ice, ne se promène que seul·e dans les intérieurs à moitié vides et étroits – impasses, le long des portes et des passages verrouillés – les îles de ces nouveaux ensembles médiévaux, – et dans cet espace à première vue peu interactif, l’invité·e se voit confier le rôle d’observateur·ice.