Exposition des diplômé·e·s 2024 en options art & design Beaux-Arts de Marseille — INSEAMM

Vernissage et performances le 30 août à 17h00

30 août – 13 octobre 2024

Friche la Belle de Mai

41 rue Jobin, Marseille 3e

Ouvert les après-midi du mercredi au dimanche

 

À la levée du jour et à la tombée de la nuit, dans son microclimat et sa biorégion qui le distinguent du centre-ville, le campus des Beaux-Arts de Marseille à Luminy, aux portes du Parc national des Calanques, offre des paysages éblouissants. Il dégage aussi une douce inquiétude, latente. Sans jamais qu’on sache ce qui se cache exactement derrière elle, comme au début d’un thriller qui pourrait tout autant devenir un coming-of-age qu’un Hitchcock. Peut-être est-ce l’ombre orangée des sangliers ou des renards qui sillonnent ce territoire peuplé d’étudiant·exs et de professeur·exs le jour, de créatures réelles et fantastiques la nuit. Ses qualités architecturales permettent des déambulations multiples, parfois sinueuses, entre ses bâtiments et patios – chaque trajet devenant une aventure en soi. C’est à partir de ce lieu que Campus Panic propose d’approcher les pratiques des artistes et des designers diplômé·exs des Beaux-Arts de Marseille. 

 

L’expression campus panic renvoie spécifiquement à la centralité (1) de la notion de campus dans la lecture de certains événements géopolitiques, des manifestations anti-guerre au Vietnam sur les campus américains aux mobilisations qui se sont opposées — et continuent à le faire — à la guerre contre les Palestinien·nes à Gaza et en Cisjordanie (2). Le campus devient ainsi un fantasme et un mythe, sans délimitation géographique spécifique. En empruntant à cette expression la centralité d’un campus qui n’est pas un lieu, mais un paradigme, à la fois fantasmé et producteur de codes, de pratiques et de relations, l’exposition rassemble ainsi 51 artistes et designers aux travaux à la fois singuliers et faisant tous échos aux tumultes qui rythment le présent. Si à Luminy, l’inquiétude est souvent douce, c’est face aux troubles du monde qui les entoure que les artistes produisent et que certain·exs s’engagent. Avant qu’il ne soit un huis clos ou un lieu de retrait, le campus est donc une condensation du monde et nous permet de partir d’un territoire précis — avec des oeuvres qui mobilisent le paysage et sa représentation — pour traverser l’inquiétude, latente, d’un contemporain ébranlé par les crises et les angoisses, vers des travaux qui se proposent de mobiliser l’archive pour répondre aux vertiges, de détourner les symboles et les mythes, d’investir des rituels et des imaginaires mystiques pour s’installer enfin dans une sorte de tendresse, affrontant les traumatismes et les assignations dans des gestes plus frontalement tournés vers la société. Pour que la panique change de côté. 

 

(1)Voir à ce sujet l’éclairante analyse de Samuel Catlin, chercheur en études juives à l’Université de Buffalo, qui montre que cette notion de campus, jamais délimitée ni dans ses contours géographiques, ni académiques, vient homogénéiser une multitude d’acteurices dans une masse renvoyée à son progressisme woke et élitiste (in “The Campus Does Not Exist », Parapraxis 4, été 2024. Lien : https://www.parapraxismagazine.com/articles/the-campus-does-not-exist – consulté le 10/06/2024). 

(2) Dans le même article, Samuel Catlin montre également que l’intérêt disproportionné des médias pour ce qui se passe dans les campus vient mettre au second plan ce pour quoi les étudiant·exs et activistes se mobilisent. 

 

Salma Mochtari, Commissaire de l’exposition